Olympe à Paris, Repérages

Depuis 2009, Catel Muller arpente Paris sur les traces d’Olympe de Gouges à la recherche des décors de sa révolution. Voici un aperçu de ces dessins de repérages, sur un texte de José-Louis Bocquet.

Quand Olympe arrive à Paris au début des années 70, elle quitte définitivement sa ville natale de Montauban où elle née quelques 24 ans plus tôt, en 1748.

Avant Paris, Olympe a donc vécu une première vie. Sous le nom de Marie Gouze, elle a contracté un malheureux mariage de raison à l’âge de 18 ans, connu l’enfantement l’année suivante puis le veuvage quelques mois plus tard. Recouvrant la liberté de ses faits et gestes, elle décide de ne plus jamais la reperdre. Elle se fera désormais appeler Olympe de Gouges.

A Paris, Olympe n’arrive pas seule. Elle est accompagnée de son fils Pierre et accompagne son amant et riche protecteur, Charles Biétrix. Elle lui a refusé sa main et ne reviendra jamais sur cette résolution. La petite montalbanaise à l’accent caractéristique entend bien conquérir la capitale et, de fait, elle en partagera intensément les plaisirs et les douleurs. Pour cette nouvelle vie, Olympe sera parisienne. Libertine puis révolutionnaire.

Un recensement effectué à la veille de la révolution estime la population de Paris à environ 650 000 âmes. Selon le plan Turgot, établi 30 ans plus tôt, l’agglomération urbaine de la capitale ne dépassait pas la porte Saint Martin au nord,  la rue de la Santé au sud, l’hôtel des Invalides et le Faubourg Saint-Antoine à l’ouest et à l’est.

Le biographe d’Olympe, Olivier Blanc, recense pour elle près d’une dizaine de logements différents entre 1774 et 1793. Olympe n’a pas la bougeotte, elle a le sens pratique. Elle se déplace géographiquement en fonction de ses intérêts intellectuels.

Si elle est à Versailles, c’est pour assister aux États généraux. Elle est rue de Condé quand il s’agit de faire jouer ses pièces au Théâtre Français. Elle s’installe dans le village d’Auteuil pour se laisser éclairer par les lumières de ses voisins – Condorcet, sa femme Sophie ou la veuve du philosophe Helvétius, l’amie de Benjamin Franklin.

Quand elle emménage rue du Faubourg Saint-Honoré, c’est pour être plus près de l’Assemblée et des clubs politiques. Mais en s’installant, en dernier lieu, place Dauphine, elle se rapproche dangereusement de la sinistre Conciergerie.

Dans ce Paris et ses alentours – pas si grand -, elle croise et rencontre la plupart de ceux qui ont laissé leurs noms dans les livres d’histoires au chapitre de la Révolution: Voltaire, Rousseau, Mirabeau, Lafayette, Bernardin de St Pierre, Pilâtre de Rozier, Philippe Egalité, Condorcet, Brissot, Théroigne de Méricourt, Desmoulins, Marat, Robespierre, Collot d’Herbois, Fouquié-Tinville. Elle est surtout l’amie de l’écrivain Louis-Sébastien Mercier qui avec son Tableau de Paris en 12 volumes a fait de la capitale un portrait impressionniste toujours considéré aujourd’hui par l’historienne Arlette Farge comme « un joyau ». Olympe y est esquissé comme femme de lettres.

Olympe est la fille illégitime d’un membre de l’académie française et bon sang ne saurait mentir. En ces années d’ancien régime, l’esprit libertin va de pair avec une certaine liberté d’expression ; l’Esprit des Lumières se reflète dans une boule de verre aux multiples facettes. Femme de lettres, engagée sans être gagée, Olympe aura écrit ou dicté plus d’une centaine de texte – pièces de théâtre politiques ou légères, affiches pamphlétaires, roman et fascicules. C’est vraisemblablement entre sa maison d’Auteuil et son appartement parisien qu’elle rédige en 1791 sa Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne – dédiée à la reine – qui cherche à rétablir un équilibre avec la Déclaration des droits de l’homme, à usage exclusivement masculin. « La femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits. » et « La femme a le droit de monter à l’échafaud, elle doit aussi avoir le droit  de monter à la tribune. », écrit-elle. Ces deux articles révolutionnaires en leur temps le resteront en France jusqu’à la seconde moitié du XXe siècle.

Olympe de Gouges meurt à Paris à l’âge de 45 ans, guillotinée le 3 novembre 1793 sur la place de la Révolution, ancienne place Louis XV, future place de la Concorde. Proche de la mouvance girondine, elle aura défié une fois de trop les Montagnards de la Terreur. On rapporte que la première féministe de l’histoire de France est montée sur l’échafaud avec courage et dignité.

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